Séminaires

Des Neutrinos ... au vin de Bordeaux

par Philippe Hubert (CENBG)

Europe/Paris
Amphithéâtre

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Description
Depuis maintenant plus de 30 ans, un grand nombre de physiciens dans le monde entier sont activement à la recherche d’un processus rare de radioactivité, appelé double décroissance bêta sans neutrino. Cette décroissance correspond à l’émission simultanée de 2 électrons uniquement (pas de neutrino dans la voie de sortie). Paradoxalement, si un tel processus était mis en évidence, cela donnerait des informations fondamentales sur la nature et la masse du neutrino. La période de ce processus est supposée être très longue, au-delà de 1024 ans, ce qui implique la nécessité de pouvoir observer quelques évènements par an, et par suite des conditions exceptionnelles sur les niveaux de bruit de fond. Ainsi les expériences doivent être installées dans des sites souterrains contre le rayonnement cosmique, doivent être blindées contre les gammas, neutrons et radon émis par les matériaux environnants, et finalement doivent être construits avec des matériaux « non radioactifs ». Nous décrirons très rapidement l’expérience NEMO, actuellement en prise de données au Laboratoire Souterrain de Modane (LSM). Dans le but de sélectionner et de contrôler les niveaux de radioactivité dans les matériaux, la technique de la spectrométrie gamma ultra bas bruit de fond a été développée au CENBG depuis déjà plus de 15 ans. Les sensibilités de mesure se situent actuellement au voisinage de 0.3 mBq/kg, soit 4 à 5 ordres de grandeur au dessous des taux de radioactivité habituellement rencontrés dans la nature. Appliquée en oenologie, cette technique a permis de mettre au point une méthode non destructive de datation en exploitant les infimes traces de 137Cs contenues dans les vins. L’origine de ce 137Cs provient des retombées des essais nucléaires atmosphériques et de l’accident de Tchernobyl. Le vin garde en mémoire ces évènements. Ainsi, à partir de la mesure de l’activité en 137Cs contenue dans chaque bouteille, et par comparaison avec une courbe de référence, le millésime d’un vin peut être vérifié, et ceci sans ouvrir la bouteille. Outre le 40K et le 137Cs, le vin contient également d’autres isotopes radioactifs émetteurs gamma, comme le 210Pb, les isotopes 226 et 228 du radium et leurs descendants, et parfois l’uranium lui-même. Nous travaillons actuellement sur les possibilités de mesurer simultanément tous ces isotopes et d’établir ainsi une « carte d’identité » pour un vin donné. Cette technique peut également être utilisée pour la recherche des contrefaçons et nous donnerons quelques exemples, comme les sels de mer, les pruneaux d’Agen ou encore le chocolat.
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